Le premier roman de Mahamat-Saleh Haroun, de l'école de cinéma CLCF

Mahamat-Saleh Haroun, cinéaste brillant et engagé auprès de la cause tchadienne, revient avec, cette fois, un roman sensible à la langue vibrante.

Ancien étudiant en section réalisation à l’école de cinéma CLCF, Mahamat-Saleh Haroun, né à Abéché, au Tchad, en 1961, se fait connaître sur la scène internationale cinématographique avec son second court-métrage : Maral Tanié, primé au festival Vue d’Afrique. Ce film poignant raconte le drame d’une jeune fille de 17 ans, mariée de force à un homme de plus de trente ans son aîné,  qui décide de se refuser à son mari.

Devenu premier réalisateur de l’histoire du Tchad, Mahamat-Saleh Haroun enchaîne, en 1999, avec Bye Bye Africa, son premier long métrage. Documentaire autobiographique tourné à l’occasion du décès de sa mère et primé à la Mostra de Venise, ce film fait définitivement d’un Tchad dévasté par la guerre le centre de son œuvre. Membre du jury du 64eme festival de Cannes, présidé par Robert de Niro, Mahamat-Saleh Haroun est désormais un cinéaste aux engagements reconnus et respectés dont la carrière sera récompensée en 2008 par le titre de Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres.

En 2010, il nous avait fait l'honneur d'être président du jury des étudiants des sections Assistant réalisation et Script lors de leur Grand Oral de fin d'année.

Aujourd’hui, c’est dans un art différent que s’illustre Mahamat-Saleh Haroun puisque sort début mars prochain, chez Gallimard dans la collection Continent Noir, son premier roman : Djibril ou les ombres portées.

Une fois encore, le cinéaste devenu romancier, plante le décor du Tchad des années 80. Dans un pays ravagé par une guerre à la fois internationale et intestine qui oppose le Tchad à la Lybie et les factions de Weddeye, proche de la Lybie et celles de Hissène Habré qui cherche à supprimer l’influence lybienne, Djibril tombe amoureux de la belle Hilwa.
C’est donc de nouveau à une histoire d’amour contrariée par les errances de l’Histoire et les drames de la guerre que l’auteur nous convie.

«Puisque le passé se dérobe, se dissout, je veux sauver le présent. L’emballer et le mettre en lieu sûr pour les générations futures. Je veux qu’ils sachent. Qu’ils ne tombent pas dans le trou noir du passé, comme moi. Contrairement aux gens d’ici, je parle peu. Je suis un taiseux. Je sais que nous avons eu la parole en héritage. Nous sommes condamnés à lui donner toute la place qui lui revient. "La parole, ça se décortique", disait un vieux sage burkinabè. Je suis chagriné de constater à quel point nous l’avons dévoyée, la parole.» 

C’est en terre d’Afrique que cet ancien étudiant du CLCF a construit une langue riche, imagée, sonore, qui nous séduit par son rythme et par l’urgence d’une voix qui dit l’amour et l’urgence de l’amour dans un pays plongé dans une guerre fratricide qui détruit tout et ne laisse que l’espoir.

 

Mahamat Saleh-Haroun multiplie les casquettes : cinéaste, écrivain,  il s'engage également en politique puisqu'il vient de rejoindre, depuis le 5 février dernier, le gouvernement du président tchadien Idriss Déby Itno en tant que Ministre du Développement touristique, artisanal et culturel.